L’Endometriose

Endométriose

 

Qu’est-ce que l’endométriose ?

Il s’agit d’une maladie féminine « originale » car elle n’appartient à aucun groupe de maladies (infections, cancers, dégénérescences, maladies vasculaires, maladies immunitaires de système…).

C’est une maladie inclassable trouvant son origine dans la localisation de cellules provenant de la muqueuse utérine (ou endomètre) en dehors de leur habitat naturel qui est la cavité utérine (métaplasie). Ces cellules sont capables de se multiplier en dehors de leur site originel et de proliférer pour donner naissance à des implants (petite greffe de quelques mm) puis parfois à des nodules voire de véritables tumeurs (non cancéreuses).

La conséquence est une modification de l'anatomie locale, d'une inflammation et de profondes modifications physico=chimiques du milieu interstitiel : apparition d'adhérences génant le fonctionnement local des ovaires et des trompes, mais aussi d'autres organes. cela explique les symptômes de cette maladie qui seront vus plus loin.

Les cellules d'endométrioses sont, tout comme l'endomètre, très sensibles aux hormones sexuelles, cette particularité sera exploitée pour les traiter.

L’origine de l’endométriose est incertaine, il est possible qu’elle trouve une explication dans le reflux menstruel (remontée du sang des règles par les trompes). Ceci explique que l’on cherche à supprimer les règles par des traitements chez les patientes atteintes d’endométriose.

On comprend également pourquoi les symptômes sont plus importants en période de règles, et également la guérison complète après la ménopause.

 

Où se place l’endométriose ?

Le site habituel de cette maladie est le pelvis (autour de l’utérus) puisque c’est l’endroit où se concentre le reflux menstruel.

Les organes le plus souvent atteints par les "implants" (petit foyer d'endométriose élémentaire de quelques mm seul ou en groupe de plusieurs) sont naturellement les organes génitaux internes (ovaires trompes, utérus, col, vagin) et le péritoine.

Dans les formes sévères, les implants se regroupent et fusionnent pour constituer des "nodules", il s'agit d'une évolution appelée endométriose infiltrante ou profonde : l'endométriose peut infiltrer un ou plusieurs des organes et tissus pelviens urinaires (vessie, uretères), ou digestifs (rectum, sigmoïde, appendice, intestin grêle pelvien ou iléon). Si les nodules sont plus profonds ils peuvent infiltrer les nerfs pelviens. Le péritoine (enveloppe des organes et de la cavité abdominale) est constamment atteint. 

Les cicatrices sont également un site classique de l’endométriose, particulièrement les cicatrices des interventions gynécologiques ou obstétricales. Il s’agit de nodules douloureux (boule perceptible en palpant la région), la douleur se renforce au moment des règles et le nodule grossit : ombilic après coelioscopie, cicatrice de césarienne, muscles abdominaux, épisiotomie…

D’autres localisations beaucoup plus rares ont été décrites dans l’abdomen haut, voire dans le thorax mais ceci est exceptionnel.

 

Classification

Il en existe plusieurs, nous utilisons la classification AFSr (American Fertility Society révisée)

Elle est établie après établissement d’un score après évaluation par coelioscopie 

Stade I minime

Stade II modérée

Stade III moyenne

Stade IV sévère`

Les stades sont corrélés statistiquement à l’aggravation des symptômes de douleurs et d’infertilité

Symptômes et conséquences de l’endométriose

La douleur est le symptôme majeur et le plus fréquent.

Il s’agit de douleurs pelviennes aggravées pendant les règles (douleurs cataméniales).Les douleurs ont tendance à s’aggraver avec le temps, nécessitant des consultations multiples, parfois en service d’urgence, une impotence fonctionnelle et un absentéisme professionnel ou scolaire, la consommation d’antalgiques de plus en plus puissants et en quantité de plus en plus grande.

En plus des dysménorrhées (douleurs de règles) il peut exister des douleurs lors des rapports sexuels (dyspareunies), des mictions (dysuries) ou lors de la défécation (selles).

Toute douleur aggravée par les règles est suspecte d’être une endométriose.

L’infertilité est loin d’être systématique mais peut être liée à une endométriose. Dans les centres de procréation médicalement assistée (PMA) on la recherche et on trouve 30% d’endométriose.

Le traitement médical et chirurgical améliore l’infertilité, il est parfois nécessaire de recourir aux traitements de PMA

D’autres symptômes peuvent être causés aux organes atteints profondément par la maladie :

Saignements du rectum en période de règles

Colique néphrétique en cas d’atteinte de l’uretère

Saignements urinaires en cas d’atteinte de la vessie

… souvenez-vous, tout symptôme aggravé par les règles est suspect d’être une endométriose.

 

Comment fait on le diagnostic?

 

L’interrogatoire est orienté et suspecte cette maladie

L’examen clinique pelvien par un gynécologue permet parfois de percevoir des signes directs, en particulier la perception au toucher vaginal de nodules ou tuméfactions pelviennes ou vaginales.

L’imagerie :

  • L’échographie endovaginale permet d’observer les grosses localisations telles que les kystes ovariens et les gros nodules de l’espace entre rectum et vagin.
  • L’IRM est l’examen le plus spécifique et retrouve parfois des signes très discrets comme des épaississements localisés du péritoine.

La coelioscopie : examen chirurgical vidéo-endoscopique sous anesthésie générale de la cavité abdominale permettant le diagnostic de certitude (par prélèvement et vision directe,) et le traitement de l’endométriose. Il s’agit d’un examen chirurgical qui n’est justifié qu’en cas de diagnostic certain ou très probable avec IRM positive, en cas d’échec des traitements non spécifiques  donnés à titre de traitement d’épreuve, ou parfois dans le cadre d’une procédure PMQA pour optimiser la prise en charge et augmenter les chances de de grossesse.

 

Quels sont les traitements?

 

Traitements médicaux non spécifiques (utilisés dans d’autres problèmes ou pour la contraception) ce sont les traitements hormonaux, réalisant des cycles artificiels, ou un blocage des règles

  • Les oestroprogestatifs (« pilules » classiques) 
  • Les microprogestatifs en prise continue sans règles (« micropilules » contenant uniquement de la progestérone faiblement dosée)
  • les macroprogestatifs en prise continue ou séquentielle
  • Les stérilets « hormonaux » contenant de la progestérone (durée 3 à 5 ans)
  • Les implants hormonaux à la progestérone placés dans le bras (durée 3ans)

Ces traitements sont validés et efficaces, ils ne guérissent pas l’endométriose mais bloquent sa progression.

Ils peuvent être utilisés chez les patientes ne souhaitant pas de grossesse immédiatement car ils sont tous contraceptifs.

L’utilisation de ces traitements ne nécessite pas un diagnostic de certitude mais peuvent constituer un traitement d’épreuve si une endométriose est suspectée.

 

Traitements médicaux spécifiques. Leur objectif est de bloquer puissamment le fonctionnement des ovaires.

  • Le danazol n’est presque plus utilisé en France en raison des effets secondaires
  • Les analogues de la LHRH (sous forme injectable mensuelle ou trimestrielle)

Ces traitements suppriment les cycles pendant une durée déterminée. Ils créent un état de ménopause expérimentale réversible avec les effets secondaires  liés à cet état (bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, …) Il est admis de les utiliser au maximum pendant un an afin de limiter leurs effets sur l’os en particulier.

Les effets secondaires sont limités par l’utilisation d’une compensation hormonale permettant de conserver un bon confort en supprimant les douleurs.

Ces traitements sont très efficaces sur la douleur et sont habituellement utilisés seuls ou en relais après une chirurgie, ou dans le cadre de certaines procédures de PMA.

Leur utilisation limitée dans le temps est habituellement relayée par un traitement non spécifique.

 

Traitement chirurgical

Son but est de supprimer la douleur tout en  préservant la fertilité et les organes pelviens.

Il consister à détruire ou enlever le tissu endométriosique à la demande et de manière la plus complète possible.

La voie d’abord utilisée de manière habituelle et recommandée est la coelioscopie ou laparoscopie. Cette technique chirurgicale utilise l’ombilic comme abord principal, associé à d’autres abords pour insérer les instruments chirurgicaux 

Chirurgie des stades I et II, une chirurgie ambulatoire comportant des ablations de zones péritonéales est habituellement suffisante et efficace

Chirurgie des stades III et IV, formes plus sévères, les procédures sont effectuées en hospitalisation standard et comportent des temps de dissection plus longs et plus difficiles. Ils nécessitent parfois des chirurgies à plusieurs équipes chirurgicales de spécialités différentes (gynécologue, urologue, digestif).

Ces procédures nécessitent 

  • un bilan préopératoire rigoureux comportant des examens complémentaires visant à préciser l’étendue et la profondeur de l’endométriose dans les différents organes génitaux, digestifs et urinaires  (voir chapitre suivant)
  • Une concertation et une coordination des équipes chirurgicales et anesthésiques avant et pendant l’intervention pour déterminer quel geste sera effectué 
  • Une coordination de la prise en charge avec un médecin spécialiste en PMA pour les patientes infertiles
  • Une information loyale de la patiente sur la nature de chirurgie envisagée, les bénéfices escomptés, les conséquences et complications possibles

Ces chirurgies comportent généralement l’ablation de tumeurs endométriosiques atteignant les nerfs et les vaisseaux pelviens. Parfois elles justifient l’ablation de fragments d’organes tels que l’utérus, les ovaires, la vessie, le rectum, le vagin, les uretères ou l’intestin grêle et des gestes associés comme la pose de sondes urétérales « double J », une dérivation temporaire des selles (anus artificiel temporaire), ou une sonde vésicale conservée de manière prolongée.

Des complications sont possibles, directement liées aux organes touchés : infections, hématomes, péritonites, fistules digestives ou urinaires, adhérences pelviennes, anovulations, troubles mictionnels, rétention aigüe ou chronique.

La lourdeur possible de ces procédures nécessite, comme dit plus haut une analyse approfondie et loyale du rapport bénéfice risque pour une maladie bénigne et qui ne justifie donc en aucun cas des mutilations étendues et des séquelles définitives.:

Doit on faire une opération ? Laquelle ? Il ne faut pas faire une opération dont les conséquences seraient plus graves que l’endométriose.

Dans ce contexte, notre groupe discute des dossiers d’endométriose sévère dans une réunion de concertation pluridisciplinaire comportant des chirurgiens gynécologues, urologues et digestifs, une gynécologue spécialiste de l’infertilité dans un centre de PMA, un radiologue avec relecture des IRM en séance, des gastro-entérologues.

 

Bilans et examens complémentaires possibles avant chirurgie d’une endométriose infiltrante sévère.

Digestifs : 

  • recto-coloscopie, gastroscopie
  • Echo-endoscopie (examen couplant une endoscopie souple et une échographie)
  • Echographie endorectale

Urinaires :

  • Uroscanner 
  • Cystoscopie

Gynécologique (en cas d’infertilité et désir de grossesses)  :

  • Bilan de fertilité
  • Bilan hormonal
  • Réserve ovarienne

 

La douleur de l’endométriose. Impact physique et psychologique. 

La douleur endométriosique est une douleur chronique et récurrente, mais a la particularité

  • d’atteindre des femmes jeunes et en bonne santé par ailleurs,
  • et  d'être majorée en période de règles. 

Culturellement le phénomène des règles est considéré comme mystérieux, inquiétant, voire impures ; il est souvent considéré comme normal (même par des femmes) de souffrir, il est mal vu ou inconvenable de parler et a fortiori de se plaindre de ses règles, la mauvaise connaissance de cette maladie conduit par cela à un diagnostic retardé voire ignoré.

 Les femmes sont fréquemment peu écoutées par leurs proches et même les thérapeutes, la tendance étant de sous estimer ou de banaliser ces douleurs récidivantes. Il en suit un isolement progressif et une auto-dépréciation, un enkystement.

L’impact sera donc double sur la vie personnelle, professionnelle et sexuelle mais aussi et insidieusement sur la vie amoureuse et sociale par un enfermement progressif de la patiente dans sa douleur aboutissant parfois à des situations dramatiques.

La prise en charge de la patiente et de sa douleur doit prendre en compte cette notion, offrir une écoute, une compréhension et des explications. Il existe des associations et sites de patientes atteintes d’endométriose permettant de contribuer à une reconstruction progressive de la personnalité.

Cet abord particulier est indissociable des traitements traditionnels pour espérer une guérison et une restauration de la « qualité de vie ».

« Une vie formatée par la douleur » impressions recueillies

« La douleur est diffuse dans ses manifestations corporelles, elle a des dimensions physiques et psychologiques. »

« La douleur s’accentue en sévérité et en durée au fil des années, presque « dispersée » momentanément par les traitements mais revenant constamment »

« Faible reconnaissance, sous estimation, mauvaise prise en charge des praticiens de santé »

« Nombreuses adaptations  du style de vie, sacrifices nécessaires dans la vie de chaque jour»

« Limites des traitements conventionnels dans le contrôle des douleurs »

« Contrôler le douleur : soit le suicide, soit un combat »

Ref : journée de la Société de Chirurgie Gynécologique Pelvienne  (SCGP) - Paris Sept 2016

 

Mots de patientes : dyspareunies et signes fonctionnels digestifs

Douleur forte ou vive perturbant ou interrompant les rapports sexuels

Appréhension des rapports sexuels à couse des douleurs

Douleurs au moment d’aller à la selle, défécation douloureuse pendant les règles

Spasmes, crampes, douleurs abdominales avant d’aller à la selle, pendant les règles.

Diarrhées pendant les règles

Ballonnement, gonflement abdominal pendant les règles

Ref : journée de la SCGP Paris Sept 2016

Les pathologies